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(crédit photo : moi-même)
Evidemment dans les métros nous ne sommes pas toujours d'humeur à nous laisser dessiner... C'est comme les photos il y a des jours avec et des jours sans. Des jours où on foutrait des torgnoles à la moitié de l'humanité et d'autres où on irait bien faire un bisou (encore que pas vraiment tout le monde en fait...) à tout le monde. Mais bon, ceci étant il reste quelques dessins pas trop mal à regarder sur ce site.
Cette joie qui dévale cascadant, de la nuque aux chevilles, qui suciste frissons et tremblements est celle qui ravit le coeur à la dernière seconde. Pas de minute plus violemment tendue que celle qui précède le départ, contre le reflet brûlant d'un oeil agathe, cerné de faux cils entouré de bijoux, les larmes...
Il fait face dans la nuit le regard posé sur mes lèvres brunes. A chaque frôlement de cil c'est le temps qui résonne contre la chair flasque, blanche, froide de nos torses gelés.
Le bitume sous nos pieds n'est ni dur ni amer. Pas plus qu'un jour de plus qui s'enfuit sous les cils baissés d'une demoiselle. Ces pas résonnent et c'est ma fuite qui me choque. Ces pas me frôlent et c'est un regard qui m'attrape et me sort de la nuit, soudain, le jour, les lumières qui brillent, la course folle des passants, passantes, abeilles qui butinent, vieux bourdons bourdonnants, sots et sottes, invertébrés, décérébrés...
Ma course a dépassé le millénaire dans le champagne qui coulait contre nos tympans et je me dis en embrassant ce vieil homme qui n'aimait plus la mer, pas plus que les femmes. Je me dis que non, pour un morceau de vie brillante arraché aux dents du temps froid et cette fois amère et brutale, j'aurais vendu une partie de nos souvenirs.
Il regarde mes lèvres et je souris. (comme j'ai toujours sourit d'ailleurs quels qu'ait pu être les instants difficiles, les moments de doutes et les évanouissements volontaires).
Ses yeux gris vert, en reflet contre l'eau froide de l'air qui nous sépare s'attarde un moment. Je souris toujours. Son corps tendu, ses mains que je devine absentes, son visage lisse traversé par tant de mots silencieux, tant de valses-hésitations auquel j'ai envie de répondre follement. "Prends soin de toi". Et ce baiser qui n'en finirait pas de se poser contre la peau de ces cils, contre sa tempe endormie, contre la paume et le dessus de ses mains rudes.
Non. A cet homme il n'est pas possible de dire autrechose qu'une horrible banalité, un regard qui cache sa tendresse et qui évite de venir déverser ses années de retenue dans ses yeux à présents fermés.
Non rien n'est possible de tout cela. Seul le silence accompagne le regard et la main qui se lève pour dire aurevoir. On ne sait jamais peut-être nous reverrons nous un autre jour, une autre nuit en soi repliée, un autre trajet pour l'infini ou nulle part.
Les freins crissent contre les vieux rails, la loco fatiguée marque l'arrêt. Encore une fois mes pieds trouvent le chemin de la sortie.
Cette joie qui dévale cascadant de la nuque aux chevilles est celle de vous avoir croisé un jour au-dessus du monde, en suspens quelques instants avant que ne redémarre le train, train quotidien de la vie qui déroule son lent film ennuyeux : les ceci et les cela, les trucs et les machins, les sourires et les mouvements déconvenus, les allers et les venus, les ventes à l'arrachée, les achats forcés.
Le dos se voute. En marchant je regarde droit devant moi. Il n'y a que cela à regarder, droit devant soi.
J'hésite à me retourner et c'est le crève-coeur continuel de ne pas pouvoir se retourner, de devoir regarder devant soi : là où il n'y a rien. Là où il n'y a personne.
A un regard gris vert.
* ndlarédactiondici/etpasd'ailleurs
Des fois je passe un temps fou à m'observer le nombril mais c'est qu'il est bien caché et donc je cherche. Excusez cette invasion nombriliste...
Sourire (...).