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  • Temps.

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    Mon ami le temps a toujours une longueur d'avance sur moi. Il court à travers bois et champs, se faufile entre les brins d'herbes, fait chanter les chevelures dénouées. Arbres, forêts, vallons, chemins, tous courbent l'échine, arrondissent le dos, présentent la nuque à cet ami qui vient au soir tombé délivrer leurs pensées du jour passé. Milles bêtises flottent encore dans l'air, des poussières éclairées par la lune. Grains de pollen oubliés, soupirs d'herbes bien aise.

    Mon ami le temps m'a attrapée cent fois au détour d'un chemin quand je courais enfant en retard. Cent fois a promis la lune devant mes yeux ébahis. C'est qu'il file et qu'il est difficile pour un enfant de le suivre. Comme la lune penche quand on tente de l'atteindre le temps s'écoule à chaque désir de lui.

    Mon ami le temps.

    Un de ces jours finissant près d'un rosier aux épines tombées, je finirais bien par comprendre qu'il n'est autre que mon ombre après laquelle je cours depuis tant d'années.

    Si j'écris avec la pointe d'un souvenir quelques notes auxquelles je donne la forme d'un poème... cela donne quelque chose comme

    Mon ami le temps peint vingt roses
    Sous la lumière rousse d'une brassée de secondes.

    Au coeur d'un bouquet de minutes repliées
    L'ombre d'un regard traverse
    Nos pas perdus.

    Vingt roses s'avancent.
    Si lancinant le silence étale a volonté
    Sa robe de velours pourpre.

    Mon ami le temps
    A mille ans
    de partage
    mais on ne sait plus
    qui de nous ou lui
    est le plus âgé.

    Quand nos yeux fermés s'envolent pour l'éternité.
    Il frôle nos paupières
    D'un revers discret.

    Mille ans le temps,
    Mon ami a toujours vingt ans.

    Comme vingt roses suspendues
    aux années, mille ans...

    ( mille ans au secret des années passées...)

  • Eaux.

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    L'eau dort mais c'est un semblant de sommeil

    En surface nulle ride n'efface la ligne souple des eaux en mouvement

    Nulle trace ne garde le souvenir d'un mouvement

    Nul moment autre que paisible

    Et tant de silence pour couvrir le reflet rigide.

    L'eau dort mais ensemble

    Eau mouvement tranquillité s'apaisent et se bercent


    Ensemble s'endorment les rives charnues aux lèvres closes.

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  • Comment ?

    Comment allez vous faire pour dissimuler ce monceau d'horreurs dont le souvenir vous hante continuellement?

    Il vous revient d'une lecture ancienne que du crime le pire des châtiments est encore le remord. Il tue c'est certain, vous poursuit malgré vous, ne vous lâche pas une seconde... La conscience voyez-vous est une des choses les plus difficiles à noyer. Une fois la lumière faîte rien ne lui permet plus de demeurer dans l'obscurité. Tout corps plongé...Vous vous souvenez de cette phrase...Archimède...Le bain...L'objet que l'on tente de maintenir dans le fond de l'eau mais qui, inéluctablement reprend le chemin de la surface. C'est un peu ainsi que votre conscience agit maintenant que vous savez.

    La lumière nous est à nous autres êtres humains essentielle pour survivre...Et malgré la bassesse de certains cieux nous ne pouvons nous empêcher de lever les yeux en attente du "grand-jour".

    Comment... est bien la question qui vous tourmente sans répit. Boire, voyager, vivre, rire, rien de tout cela ne vous détourne de vous même car c'est toujours vous qui chaque matin devrez affronter votre regard dans le miroir. Vous ne pouvez plus aussi aisément les années passant, les actes s'enchaînant, les mensonges et les compromissions aidant relever la tête, et vous affronter aussi directement que vous le faisiez autrefois.

    Mourir la conscience pure est un cadeau que peu d'hommes savent se préserver... C'est un honneur de s'offrir autant de respect et de considération vous le savez. Et cette seule phrase à écrire est un acte de torture vous le ressentez.
    Que reste t-il en vous qui n'ait été souillé vous demandez vous furieusement.

    Le dernier jour, le dernier souffle est celui que vous devrez vivre seul. Personne d'autre que vous n'aura à affronter ce moment. Vous ne pouvez l'ignorer malgré les distractions que vous vous offrez en guise de fuite.

    "L'homme vivant".
    "L'homme en fuite".
    Intermède.

    Pourtant vous continuez de nier... Vous dîtes : " moraliste" en entendant ces paroles. Vous continuez de nier. Malgré l'évidence, vous crevez de trouille. Je le vois dans vos yeux. Je le lis dans votre silence. Vous ne pouvez vous empêcher de vous rappeler ces soirs d'enfances où le sommeil était léger, où chaque soir vos yeux se fermaient sur une journée limpide. La nuit, sereine n'était alors que douceur...

    J'ai touché le point G de ce qui vous reste d'âme?

    Vos yeux brillent.
    Ai-je une chance de vous ramener à la raison?

    Je pourrais essayer....
    (Inlassablement....)

    "Récupérer ce qui peut l'être".

    Dérisoire?

    Croyez vous vraiment qu'une parole puisse l'être ?


    Moi je pense le contraire. Voyez vous j'ai une foi indestructible dans le pouvoir des mots...Je sais...Face à un coup de poing qui tait toute contestation, fait sauter les dents et vous projette contre le bitume, ce n'est rien. Je vous l'accorde. Sauf que...Le temps...Il fait son oeuvre. Un jour vient...avec les souvenirs, les remords, les regrets remontent à la surface. Et ce jour là rien n'est plus important que les mots. Car voyez-vous il y a des mots que l'on prie, que l'on implore...

    Vous pleurez?

    Attendez! Je n'ai pas finit de vous parler de vous!

    Ce dernier mot que l'on souhaite tous entendre dans sa forme la plus vraie, la plus sincère quand plus rien ne demeure d'autre qu'une âme en attente d'envol dans un corps perclu de "misères", ce dernier mot qui évoque toute la douceur de notre enfance, qui fait venir de vraies larmes de joie au bord des falaises des yeux.

    Vous le rêvez cet amour fou, si doux qu'aucune forteresse n'y résiste.... Vous l'avez croisé. Ces ailes vous ont effleurées, si douces....comme ces mains...à elle...on aurait dit des ailes....Vous vous souvenez?

    Vos mouvements brutaux l'ont effrayée, vous l'avez fait fuir, comme un lourdaud qui ne sait pas ou en tout cas qui ne comprend pas qu'on n'emprisonne pas les alizés, qu'on n'enferme pas l'esprit, encore moins cette femme.

    Il y a de cela si longtemps que votre mémoire peine à vous restituer les instants d'alors. Vous aimiez alors. Vous aimiez et rien n'aurait pu vous retirer cette certitude du corps. Comme si chacune de vos fibres avait bu la douceur de ses lèvres, s'était emplie de son odeur. Car la respirer c'était comme la faire entrer en vous, la happer, l'absorber entièrement. Vous souffrez car il est évidemment cruel de se souvenir de ce qui a disparu. Il est si difficile de se débarrasser d'un simple souvenir, la sensation du bonheur qui vous poursuit jusque dans le sourire rayonnant des autres. C'est un fantôme ce souvenir. Il a des formes variées. Il apparaît et disparaît au gré du vent, de la chaleur de l'air, de l'odeur. Un rien le provoque, un rien le tue.

    Après lui c'est comme si le désert avait mangé votre coeur, il n'y a rien. Plus rien autour, plus rien à l'intérieur. Ce désert est votre solitude. Et lorsque vous parlez j'entends ce désert, vos mots sont ensablés, le son de votre voix étouffée, vous disparaissez sous des kilos de sable. Votre corps, comparé à ce qui l'entoure, des kilomètres d'air froid, parait si petit, si insignifiant, que je ne peux que vous plaindre.

    Il relève les yeux.

    Elle tourne les talons, quitte la pièce et s'en va.

    Fin de la scène. (provisoire).