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Rencontre sous-titrée

 

(A celui qui ne lit pas.)

 

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Des heures de silence. Des heures et des heures de silence complet. Des heures d’absolu silence. Pas de mots, pas de paroles. Un silence plus.... Des heures et des heures de silence. Du silence et rien que du silence. Plus de mots, plus de paroles, plus de pensées, plus d’existence de cette sorte. Plus de mots, plus de paroles. Plus rien d’humain dans tout cela. Du silence et du silence. Pas de mot. Pas de mots. Aucun. Pas un souffle qui ne murmure une parole. Parole pourquoi ? Pour dire ? Dire quoi ? Ce qui ne se dit plus. Ce qui ne se dit pas. Qui n’a pas d’autre existence. Que le silence. Dans ce silence. Il y a quelque chose que personne ne peut voir, ne peut prendre, ne peut voler. Dans ce silence il est une chose que personne ne dérobe et qui en soi ne se dérobe pas. Le silence ma belle est ce qui conserve par delà tout. Je te le dis à toi parce que tu es la seule à le comprendre. Si tu te souviens nous partagions nos silences. C’était un don ce silence. Un don de l’une à l’autre. Un don. Lui aussi il partage mes silences. Et c’est le plus beau et long moment qu’il m’ait été offert de vivre. Des silences en sa présence. Je suis là et je le regarde. Suis-je là ? Vraiment je ne le sais même pas. Parce que ses regards me frôlent.

Parce que ses mains volent autour des choses, les effleurent à peine. Et je suis regard. Uniquement cela. Un long, très, très long regard. Je me demande qui il est en le regardant toujours. C’est étrange mais je ne peux pas détacher mon regard de ce corps qui me fait face. Je dis corps parce que je n’ai pas d’autre mot pour lui. Il ressemble à un homme mais parfois je te retrouve dans ses gestes. Alors toi... Tu peux comprendre cela ? Moi je ne me comprends plus. Je disais. Disais-je seulement ou bien étais-je en train de rêver ? Vraiment parfois je dois me forcer à parler encore. Je n’aime pas cela du tout. Qu’ai-je à dire ? Rien vraiment rien. Ou bien te dire.... Te dire seulement les phrases que je connais, dans ce langage que je connais. Celui qui est écrit mais pas dit avec la bouche. Dit avec les mains qui jouent sur les touches de ce matin qui se lève. Ces cieux qui se découvrent comme il découvre les traits de son visage...Devant moi. Pour me laisser lire à moi seule les pensées qui se dessinent. Je le regarde mais j’hésite toujours à parler. Il est tellement beau ce silence pourquoi le briser...

Le son de ma voix, je l’ai oublié. La sienne emplit l’air. Mais je n’entends pas les mots. Je distingue des sons. Je reconnais des mots, des phrases. Il parle de ce monde je crois. Parle ou bien décrit. Peut-être voudrait-il dire quelque chose mais je ne le crois pas...

Je ne connais pas l’odeur de sa peau. La forme de son corps je la devine.
La chaleur de ses mains, je l’imagine. Mais je ne vais pas oser. Il est trop prés de moi. Trop proche pour que cela ne me trouble pas. Je le suis assez comme cela. Je tremble ? Non, je supporte la tension l’air de rien. Comme une enfant je fais semblant. Mal je le sens. Laborieux. D’ailleurs tu sais, je ne sais pas qui il est. Je viens de le rencontrer. Mais dans cette foule, je n’ai vu que lui. Etrange que je n’ai rien vu venir. Etrange que je ne me sois pas plus méfié. Je suis méfiante tu sais. Méfiante car _ je connais assez les dégâts et les catastrophes que ce genre d’histoire idiote peuvent produire (1). Je me méfie alors tu sais j’évite les hommes comme on évite les arbres en pleine nuit. Au hasard en découvrant une forme plus noire, plus haute. Avec tout ces sens de petit animal en éveil. Pour ne pas chuter dans les bras d’un inconnu. Pour ne pas choir blessée dans un coin de sa propre vie. Pour ne pas vivre cet amour qui déchire et qui déchaîne en soi les affres de la passion. Parce que cette passion...Je me suis souvenue...Elle m’a brisé une fois. Je ne veux pas la recommencer. Alors je m’éloigne. Gentiment, l’air de rien. Comme s’il allait se passer une chose grave qu’il fallait à tout prix éviter. Et je lis les philosophes latins.

Ah "les consolations" de Sénèque ! Je les lis et relis comme une pauvre âme à la dérive accroche ses dernières forces a un radeau. Tous les soirs, consciencieusement, je ressasse "Les consolations". Je les mâche comme une condamnée. _ C’est indigeste la littérature latine. _ Très souvent, je sombre dans le sommeil. Plus efficace qu’un somnifère ! Mais je sens, jours après jours et cela malgré des efforts surhumains, que je suis en train de couler. Ses yeux sont trop doux, bien trop suaves pour rivaliser avec tous les moralisateurs de la terre. Ils m’emportent et là la lutte devient acharnée. Heureusement je suis forte. Ouf ! J’échappe de justesse au naufrage. Des avances lui aurais-je fait ? Impossible. Je m’interdis _ tout recours à ce genre de tentative. Les aurait-il refusées ? Très certainement.

 

 

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