Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

L'ironie.

medium_collage168.2.jpgAinsi donc il fallait sourire, s'armer de patience et ouvrir la bouche comme on fait "areu" bébé puisque cela plait, puisqu'aussitôt cela s'esbaudit et se congratule fièrement autour. Ainsi donc chaque jour en regardant ses congénères on se disait qu'aucun d'entre eux n'aurait compris cette grève du sourire, cette grève du bonheur. Je n'étais pas une vache ni un quelconque autre animal je n'avais pas besoin de cela. Je pouvais ignorer le bonheur. Mon cerveau pensais-je alors s'en trouverait mis à l'abri de la connerie habituelle, du bavardage insipide des gens heureux, de la niaiserie de la vie emplit de tous ces contentements ordinaires. Non, je n'étais pas snob. J'étais juste décidée à continuer à rêver. Ca n'était pas une chose si simple à expliquer. Cela n'allait pas de soi. Et il fallait beaucoup de prudence pour tenter de mettre sa vie en place de cette manière là. Fuir le bonheur de peur que ceci-cela, n'était pas vraiment mon credo. J'avais envie de considérer le bonheur comme une idiotie destinée à nous aider à supporter l'existence un peu comme la religion, la politique ou bien les glaces à la crème épaisses et riches en morceaux de noisettes. Quand on pensait à la peine que celles-ci pouvaient vous donner quand il fallait les ouvrir, et les décortiquer. On se disait vraiment que là se trouvait un luxe dont il ne fallait pas négliger l'existence. Et si l'existence humaine était parfois aussi pénible, il fallait bien reconnaitre que ces morceaux de noisettes lui redonnait un corps que ni la politique ni la religion et encore moins la notion de bonheur terrestre ne parviendraient jamais à égaler. A dire évidemment cela n'allait pas de soi et il aurait fallut beaucoup de mauvaise foi pour défendre un point de vue aussi dénué de fondement intellectuel...Seulement de mauvaise foi, je n'en manquais pas. D'autant que j'étais décidé à ne plus me laisser influencer par l'intelligence d'autrui...A cela, j'avais la ferme intention d'opposer autant de bêtise qu'il était possible d'en rassembler pour quelqu'un de sensé s'entends. Et finalement je m'aperçus que revendiquer ses erreurs et ses propres imbécillités n'était pas aussi difficile que cela. Il suffisait de regarder la moitié de l'humanité revendiquer les siennes d'erreurs, d'imbecillités, d'égoïsme forcené, de gémissements d'enfants gâtés et on trouvait assez rapidement la recette qui permettait d'avoir l'air sûr de soi-même en affirmant des énormités. Il suffisait de prendre l'air péremptoire, à la limite de jouer la colère quand d'aventure quelqu'un aurait osé tenter avancer une contradiction.... Je m'en sortais assez bien et surtout je riais beaucoup à part moi-même. Je prenais autant de plaisir à avoir inventé ce nouveau jeu que j'en avais à découvrir le croquant d'un morceau de noisette sous le moelleux d'une crème glacée. Foin de tout sérieux! Cet ennui profond finirait par trouver sa place dans ma vie en me faisant découvrir un principe fondamentale, celui de l'ironie... Et je mettrais des années je crois à oublier à quel point il fut drôle d'observer le quotidien avec cette lueur d'amusement au fond des yeux. Ecouter par exemple, les gémissements de gens auxquels l'existence avait tout donné avec le sourire et sans se départir d'un air compatissant de bon ton; en rajouter, en les plaignant ouvertement sans jamais cesser de penser à ceux d'entre nous qui au même moment et ailleurs, mourraient de faim dans le silence et l'indifférence générale ou encore à ceux qui étaient torturés ou tués en raison d'opinions politiques différentes... Regarder les photos de gens mutilés, les crânes explosés sur le sol ensoleillé à côté de nantis dont les existences étaient consacrées à se gémir dessus comme on se pisse dessus vers 80 ans. Et sourire....bien évidemment! Tout le monde se complaisait à dire : "on ne peut pas récupérer toute la misère du monde"... Bien sûr.... Moi je ne me lassais plus de sourire. Il y avait belle lurette qu'aucun de ses discours n'évoquait plus autrechose qu'un ennui profond, inaltérable dans sa durée, rassurant de profondeur, mais d'une noirceur jubilatoire.

 

Les commentaires sont fermés.