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  • Emily Dickinson

    "Nous nous habituons à la Ténèbre –
    Quand la Lumière manque –
    Comme lorsque, pour attester son Bonsoir
    La Voisine lève la Lampe –

    Un Instant – Nous marchons incertains
    Dans la nouveauté de la nuit –
    Puis – au Noir adaptons notre Vue –
    Et tête haute – trouvons la Route –

    Ainsi de Ténèbres – plus vastes –
    Ces Crépuscules du Cerveau –
    Quand nulle Lune ne se manifeste –
    Nulle Étoile – au-dedans – ne perce –

    Les plus Braves – tâtonnent un peu –
    Et parfois heurtent un Arbre
    En plein Front – mais à mesure
    Qu’ils apprennent à voir –

    Ou bien la Ténèbre s’allège –
    Ou quelque chose dans la vue
    A la Minuit s’adapte –
    Et la Vie va presque droite."

    (419)

     Une âme en incandescence

  • Marceline Desbordes-Valmore

    "J'ai voulu ce matin te rapporter des roses ;
    Mais j'en avais tant pris dans mes ceintures closes
    Que les noeuds trop serrés n'ont pu les contenir.
    Les noeuds ont éclaté. Les roses envolées
    Dans le vent, à la mer s'en sont toutes allées,
    Elles ont suivi l'eau pour ne plus revenir ;
    La vague en a paru rouge et comme enflammée.
    Ce soir, ma robe encore en est tout embaumée...
    Respires-en sur moi l'odorant souvenir."

    Marceline Desbordes-Valmore, Poésies posthumes, 1860

    http://www.poetes.com/aut_rom/index.php

    ce matin

    closes

    vent mer allées

    vague rouge enflammée

    en souvenir

  • Mystique. Joe Bousquet.

    XII

    Tu t'émeus de trouver l'expression parfaite dans un poème de ce qui est parfaitement oublié ou oubliable. Comme devant la heaulmière de Villon, tu trembles devant l'oiseau de feuilles qu'hier tu évoquais. Nous n'insisterons jamais assez sur le rôle étincelant de l'oubli.  

    XIII

    Il a fallut qu'une correspondante inconnue me redise, aprés l'avoir lu dans un de mes livres : " Je suis celle qui pleurerait de n'avoir pas de coeur." Au loin, une autre m'écrivait : " La vie est un esprit." Fais attention ton coeur est la misère de tes yeux.

    N'aime que ce qui te distrait.

    Le bleu de l'été est menaçant comme l'orage sur un bois de couleur tourterelle où les pigeons meurent de toucher le sol. Hier, je suis sorti, un autre homme est rentré.

    J'avais dit qu'il pleuvrait sur les toits de la passion; et je voyais la pluie sur le corps blanc d'un Christ  dressé au carrefour.

    XIV

    Fais de ta solitude un monde d'amour.

    XV

    Le monde de mes désirs a pris la place de mon désir. J'habite la terre des rapports hasardeux, fragiles et profonds comme la musique; ma voix en est l'ombre et ma parole le souvenir. J'habite avec ma vie un monde sans lien avec la vie et dont la dissolution abolirait jusqu'au souvenir de mon existence. Je suis la mort de quelqu'un que je ne suis plus.