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L'ombre des mots.

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Je suis entrée dans l’écriture ainsi qu’une jeune mariée, le cœur battant à tout rompre, les tempes serrées dans un carcan de souvenirs.
Et ma robe était blanche, et mes yeux brillaient, et mon sang tournait violemment dans mon ventre…Le battement se répercutait sur les murs de pierres froides, celui des cloches d’acier frappées par la corde rêche, s’y mêlant. Au sol les lys fleurissaient dans les interstices des dalles de marbre. Mon visage était blanc, les marches froides, les colombes s’envolaient battant leurs ailes immaculées dans l’air haut du dessus de nos petites maisons…Blanches aussi les maisons.

Car sais-tu ceci….

Blanc contre blanc, le regard prend sa forme claire, entre en soi, observe sagement nos forteresses intérieures sombrer, inondées de lumière. J'ai saisit la plume d'une colombe, qui s’est enfuie éprise de vent, ivre de lumière. Je l’ai arrachée vois-tu car personne ne pense jamais à offrir une de ces plumes. Et j’ai tracé, imperturbable, sur l’épaisseur des murs et contre les dalles, le premier signe d’un alphabet, puis le second.

C’était étrange vois-tu de se savoir derrière des murs alors que le ciel couvrait l’espace au dessus des yeux, que je levais, que je levais. Puis que je baissais soudainement car sur le sol je découvrais des fragments rouges, ocres, des bâtons, des pierres, des mousses, des feuilles….Je pouvais les toucher, les assembler, les regarder encore, découvrir le mot « forme » sous leur poids laissé dans la terre après que je les ai saisit. La colombe s’enfuyait, à tire d’aile. Echappée de mon regard elle ne laissait derrière elle qu’une longue attente de ciel bleu. Je me suis dit pour la première fois le mot "empreinte" puis j'ai pensé  "trace". Je n’ai jamais oublié à quoi correspondaient ces mots, puisque je découvrais qu’écrire était cette archéologie de l’empreinte, puis l’assemblage des formes où menait l’envie de lier entre eux, les mots. L’orage…Il se mit soudain à résonner. Je pris peur. Je m’enfuis. En revenant, je constatais que la pluie avait tout effacé. Le sol était neuf…à nouveau. J'ai commencé à chercher... J'étais pâle d’avoir perdu mes souvenirs. Pâle d’avoir vécu sans l’empreinte laissée par l’ombre de mes pas. J'ai exploré les interstices lumineux que les vitraux coloraient, bu la poussière des lieux, noté la couleur des moisissures dans les coins humides, dessiné en aveugle le contour des meubles, frissonné au contact des statues de marbre. J'avais l'impression de soulever la peau des ombres... Je suis entrée dans l'antre des mots, cette caverne en marchant sur des allées dallées de dévotion. Les mains liées par la prière, les yeux levés vers l'au-delà. Parce qu'il existait un au-delà, comme il existait un revers vivant à chaque année de poussière oubliée là, je le sentais.

En écrivant je retrouvais ce chemin. Il m'avait conduit jusqu'ici. Marchant doucement pour ne pas faire fuir la poussière sous mes pas, j'exhumais ces manteaux d'ombre et de poussière. J'avais la bouche emplie de ces années viellies, les yeux mangées d'ombres dansantes. Je ne savais pas voir. Je ne savais pas dire. J'étais née sans parole. J'étais née hors de l'histoire, quelquepart entre ici et ailleurs. Je n'avais pas de nom. Autour de moi rien ne se semblait se détacher de l'obscurité.

Jour.

Nuit.

Quelquepart entre ici et ailleurs.

Jamais vraiment là.

Jamais totalement absente.

Jour. L'oiseau s'envole une fois de mon regard. Nuit.

Dans un repli de terre, j'ai trouvé en rêvant un récit à exhumer, des territoires à explorer, indéfiniment...une nuée d'étoiles à contempler, un millions d'yeux ouverts à l'horizon, une explosion de sourires dans les interstices, des traces de lumière derrière la toile, un silence d'avant monde.














Dans l'ombre des mots, il y a tous ces mots qui m'ont donné la vie.
L'enfance aux milles chansons de Marie Myriam avec Comme un enfant, Barbara, mais aussi Memory avec la voix de Barbara Streisand, Le nom du petit bal perdu chanté par Bourvil, tout comme la voix de Fabienne Thibault toutes ces voix ont traversées la nuit jusqu'à moi. Mais j'allais oublier la bonne humeur de Marie-paule Belle et la force des textes de Véronique Samson.  
J'essaie aujourd'hui avec le peu de talent que je possède de traverser la nuit des autres.






 

 

 

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