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Sédiments_Avant-Garde_© - Page 263

  • Affleure.

    Affleure :

    Ebauche de sons, de mots, de parole ou d 'écrits.

    Fragilités révélées, dîtes, décrites, racontées.

    Déséquilibre calculé.

    Sur la ligne toujours....

    affleure la faille,

    à fleur d'obscurité.

    Son ombre fait frissonner l'air quand elle apparait. Le jour en transparence lui redonne son innocence. La nuit l'emplit de voiles sublimes et parfumés.

    medium_collage186.jpg

    Qui est-elle? se demandait-il toujours en la regardant marcher vers lui.

    "Elle n'est déjà plus. Elle traverse l'espace légèrement, décidée à ne plus déranger l'ordre naturel, minéral de ce qui l'entoure. Elle agit en âme solitaire, ayant rejoint depuis de nombreuses années un royaume imaginaire qu'elle nomme "le royaume des immortels".

    Elle est elle-même / la dernière / à quitter le monde / réel /  pour rejoindre celui qu'elle a rêvé puis créé, inventé, déssiné, sculpté des ombres, extrait du silence avec patience."


    Heure de pose.

    Il croit l'entendre. Il se demande toujours par quel phénomène étrange son silence à elle est un langage à lui seul.

    Le royaume des immortels?!

    Les délires les plus invraisemblables prennent place dans son esprit à la simple évocation de cette femme. Elle possède le don inhabituel de susciter d'étranges interrogations. Il remarque avec la même constance son allure irréelle. Il ne peut toujours pas détacher son regard de quelques détails qui sembleraient à tous insignifiants.

    La fascination pour la couleur de sa peau, le galbe d'une épaule, la blancheur d'un creux prés de la gorge. Son regard flou à certains instants lorsque ses yeux se posent un peu trop longtemps...

    C'est étrange se dit-il parfois. Cette impression de miroir qu'elle me renvoie avec la même régularité. Elle joue mes expressions, se cale sur mes pas, copie le rythme de mes mouvements. Par certains instants je lui mettrais bien une paire de giffle. Elle m'énerve, le sent, s'éloigne. Elle rit. Ah ça! Je crois que rien n'est plus agaçant que son rire! Il n'y a pourtant pas de quoi rire. Je ne comprends rien. Plus rien du tout. Je me demande même ce que je fais là.

    J'ai envie de partir là. C'est infernal!

    "Apparemment, mon sujet d'étude est furieux... Bien entendu je sais ce que cela fait d'être épiée, regardée constamment, observée, suivie. Bien entendu je trouve cela aussi désagréable que lui. Mais enfin....je pense qu'il a le droit de connaître cette... sensation :

    _c'est bien la moindre des choses! "

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  • Courbes finissantes.

     

     

     

    medium_collage1-4.4.jpgPose pour courbes finissantes

    Je t'inspire de drôles de choses dis? Non?

    Mais non. Tiens toi droite. Ne bouges plus.

    Voilà c'est terminé. Il range son matériel, la séance est terminée.

    Par la fenêtre un arbre en fleur. Printemps-Eté 95. (Collection "souvenirs")

     

    Conversation

    Elle: Et s'il n'y avait pas la vie de l'esprit?

    Lui: On s'ennuierait, très certainement.

    Elle: Ah.

    Oui tu as raison. J'imagine tous ces corps occupés à satisfaire leurs pulsions. Ce serait chiant, tu sais.

    Lui: Oui affreux.

    Se disant elle ouvrit une anthologie de poésie française, après quelques secondes elle releva la tête et dit.

    _"Que crois-tu que tous ces gens auraient pensé de cette époque...?"

    _"J'imagine qu'ils l'auraient détestée tout autant que nous."

    Par la fenêtre le magnolia en fleurs, les pétales au sol, le pépiement des oiseaux, un rayon de soleil, l'éternité en cours de réalisation. Avec si peu, le ciel et la terre produisaient leurs miracles quotidiens, un sentiment d'admiration l'emplit face à ce qui échappait encore aux mains humaines.  Et une envie soudaine de se dissoudre, de s'évaporer, de retourner à la terre, lui fit penser à cette suite imaginaire...

    _"Que souhaites-tu dîner?"

    _"Je souhaite me nourrir de l'air du temps. Cela ne te déranges pas j'espère."

    Ils auraient rit alors.

    Reflet dans un oeil noir.
    medium_collage.jpg
    Lui: "Alors je l'ai regardé. Je l'ai regardé me regarder. Le flash de l'objectif a percuté sa pupille. Les miens sont restés ouverts. Je suis habitué. Je suis photographe. Pourtant, j'ai cherché un sourire dans ses yeux."

    ("collection souvenirs") Printemps-Eté 1995.

    Autre moment : _ "Il me semble avoir oublié une ombre. La mine grasse glisse sur le papier, accroche parfois une aspérité puis reprends son crayonnage minutieux. Le modèle s'ennuie. La dessinatrice se demande si elle ne va pas le perdre du regard. _Ne bouge plus. Tiens moi cette pose bon sang! Elle s'énerve un peu. Le rouge de la sanguine lui couvre les doigts. Elle combat l'envie d'abandonner, puis se ré-attache à la courbe d'une hanche, au muscle d'une jambe. Le regard narquois du modèle ne lui a pas échappée. Elle choisit de l'ignorer."

    Lui: Ce regard fixe...qui n'évite jamais....droit....me fascine. J'essaie de m'échapper mais c'est comme si une force invisible me retenait, me commandant de ne pas bouger, de la laisser voir. De la laisser regarder à travers ces troubles reflets de l'âme ce que je suis, qui je suis ou bien qui je ne serai jamais. Elle oscille entre le désir de m'interroger mais se tait obstinément. Cette bouche fermée et ces yeux fixes ont une sorte de charme dans lequel je me perds aussi simplement que si nous n'étions qu'une seule et même personne.

    Elle: Merde! Tu as bougé. Un flot d'insultes amères et sinistres  sort de ses lèvres comme un flot ininterrompu de récriminations qui dans ce cas, elle le pense sont parfaitement justifiés. Merde! Merde! Et merde!
    C'est vraiment impossible de faire poser un taré de ton espèce. Allez lève-toi, rhabille toi! J'ai autrechose à faire. On verra ça un autre jour! 




     

  • Nous avons créé.


     

     

    medium_collage30.2.jpg

    Nous avons créé un territoire imaginaire : la seule terre que nous puissions posséder. Nous avons créé ce que jamais personne ne nous a donné. Nous nous le sommes offert. Ainsi soit donc ce monde qui nous ressemble, nous trouble, nous émeut, nous enchante, nous transfigure, nous illumine, nous emplit de l'essentiel et nous débarrasse de l'inutile.

    Elle: "Ca te dirait d'attraper les couleurs et de barbouiller avec moi? Ca ressemble à des visages blêmes, des corps blafards, toutes ces cloisons blanches! On trempe nos mains dans la gouache et on badigeonne les murs avec ces pinceaux d'un nouveau genre? Elle le regarde. Ses cheveux traînent dans le bleu, ses mains à lui pataugent dans un rose pathétique comme une paire de mule en plume de cygne des années cinquante. Ils sont faits pour s'entendre. A coups de couleurs primaires ils se comprennent.  Leurs deux mains jointes, forment un arc- en ciel, en trash-couleur, jaune poussin criard et vert agressif. En plus, quand ils parlent, ils inventent des phrases nouvelles. Ils vont reprendre des couleurs ces murs blancs!"

     

     

     

     

     

     

     

     

  • La chaleur que nous partageons.

     

     

     

    La chaleur que nous partageons, d'irréelle en bouleversante va traversant les travées de nos existences. Les mots que nous inscrivons sur les reins de chacun, sur le flanc, le cou, le dos vont de nos veines sanglées aux malles de nos souvenirs, aux regards profonds de nos voyages en medium_collage1-2.4.jpgeaux troubles. Plonge....je te suis....plonge....je te vis, revis, survis! Mon animal en liberté, fauve que les reflets rougeoyants enlacent au couchant. Je délire avec quelle joie! Le miel au fond des gorges, l'odeur des pins, la terre chauffée où roulent nos corps et nos accentuations mélodieuses. La chaleur que nous partageons, c'est encore le feu où nous brûlons nos regrets, nos mauvais souvenirs d'ici, puisque c'est aux ailleurs que nous destinons nos rires, sourires, vies, vivacités, désirs. Aux ailleurs que nous joignons d'un regard comme se retrouvent nos coeurs, âmes, corps aprés chaque traversées. Trouvant dans le souffle survivant la force de dire adieu, les larmes éteintes aux feux des regards, du fond, tréfond de nous mêmes luisent les mots du silence. Le langage réservé à ceux que le désir mène au-delà. Bien au-delà.

    Luit.

    La veille de notre rencontre le ciel avait inversé ses couleurs habituelles. Les nuages lourds déversaient leurs larmes sur nous. Le ciel était si bas. On foulait la grisaille, l'humidité. Pauvre de nous! Tas de corps abandonnés au froid, assaisonnés d'ennui, couverts de poussières; laideur absolue de ceux qui se trainent aux pieds de l'infini. Luit. Tes yeux luisent*. Ils luisent de cette flamme dont on ne parle pas, qui ne se dit pas, qui est trop ancienne pour être décrite, car plus personne ne se souvient d'elle. Au bûcher j'irais jeter mes vieilleries, les tiennes, les leurs : nos souvenirs, nos regrets, nos amertumes, nos déceptions, nos ratages. J'irais avec tes yeux brûlants en moi. J'irais avec ce feu intérieur que tous craignent et qui dévore jusqu'aux derniers instants de lumière. Luit. Envahit la nuit. Je te regarde partir. J'oublie la brûlure de tes mains sur ma peau. Je traverse le feu avec toi, les yeux dans les tiens, le souffle coupé par la chaleur étouffante. Sur l'air qui nous sépare, j'écris "je suis à toi". Ta silhouette me fait frissonner. Le rythme de tes pas sur le sol prononce ton retour. La porte s'ouvre, tes bras m'accueillent; résonne en nous, le chant-murmure fou. Au seuil de ma demeure je dis ton nom. Sur la peau de nos souvenirs je griffe nos adieux. J'inscris la date et le lieu. L'heure de nos adieux. Ta silhouette en flamme disparait de ma mémoire. J'écris encore tes yeux. J'écris encore. Je dis toujours. Je finis par disparaitre dans ses mots. Mon amour infidèle j'oscille dangeureusement entre ciel et terre. Je désire ton âme et cela ne peut se savoir. Cela ne peut se dire! Cela se vit. Comme autrefois vivaient les mendiants, les fous, les possédés, comme autrefois, mon amour.